mai 2007

Snooze glacial

Dominique Perras

J'appuie sur le snooze, mais une seule fois. Vous connaissez ce bon vieux bouton sur votre réveillematin, ce bouton extraordinaire qui vous offre la possibilité d’ajouter 9 minutes de sommeil? C’est un supplément particulièrement apprécié lors du réveil à 5h du matin – en fait, 3h dans mon corps, qui se croit encore dans la zone horaire des Rocheuses. Après avoir adopté la position verticale, j’ouvre les rideaux. Comme prévu, il neige sur Richmond, en Virginie. Le départ du US Open est prévu pour 8 h en ce 7 avril, le soleil à peine levé. La course sera-t-elle annulée? Comme il y a couverture télévisuelle sur une des principales chaînes américaines, j’en doute. Nous avons une heure d’auto à faire pour nous rendre au point de départ, tout juste le temps de nous enfoncer quelques aliments dans le gorgoton, même si que l’appétit manque à cette heure.

Le départ est finalement retardé d’une heure. Au moment où les coureurs «clippent» leurs pédales sur la ligne de départ, la température est la même : – 1 °C. Il neige et la route est détrempée. Heureusement, elle n’est pas gelée. Ce n’est pas la première fois que je devrai endurer une température pareille et je sais une chose: il va faire frêeette! Je profite du temps supplémentaire pour me couvrir de toutes les pièces de vêtements que j’ai sous la main: deux camisoles, deux maillots courts, deux paires de manchettes, une veste coupe-vent, un manteau thermal et un manteau de pluie transparent. Je porte aussi trois paires de gants: une paire en laine, une paire plus épaisse et des gants de vaisselle (oui, oui). Plusieurs ont enfilé des sacs de plastique dans leurs chaussures, d’autres ont coupé des sacs pour isoler leurs genoux.

Certains coureurs performent dans les critériums, d’autres dans les contre-lamontre ou dans les longues courses sur route ou en montagne ; d’autres, encore, aiment ou n’aiment pas la chaleur, la pluie, le froid. De mon côté, je n’ai pas tant de problèmes avec le froid quand je suis au sec, mais une fois mouillé je deviens souvent frigorifié. J’ai toujours considéré comme un must la capacité d’offrir de bonnes performances dans des conditions dantesques. Cependant, ce n’est pas le cas pour moi pendant cette course. Malgré toute ma volonté, après deux heures de course, je suis complètement gelé, incapable de répondre aux accélérations du peloton.

Mon compatriote Bruno Langlois, en ma compagnie jusqu’à ce moment, met un terme à sa course et décide de rentrer à l’hôtel en vélo plutôt qu’en auto. Hors parcours, donc soumis à la circulation automobile « normale », il est victime d’un chauffard en état d’ébriété. Frappé par l’arrière, il n’a rien vu venir. Il doit attendre l’ambulance 45 minutes, couché dans un fossé, gelé. Diagnostic : fracture du péroné et grosse plaie ouverte sur le mollet.

La course est remportée par un autre Canadien, Svein Tuft, qui passe ses hivers dans une cabane de bois rond dans les Rocheuses. On peut maintenant l’inclure dans la catégorie de ceux qui performent au froid et sous la pluie !

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Avant cette galère, j’ai pris part à trois compétitions en Californie en mars, soit des courses à Merced, à Fresno et à Redlands. Notre calendrier de courses a changé abruptement lorsque le Tour de Maloti, qui devait avoir lieu à la mi-mars en Afrique du Sud, a été annulé moins de deux semaines avant notre départ. Et puis nous avons appris que le Tour de l’Utah était aussi annulé, tout comme une course au Texas. Le Tour de Géorgie et le US Open, eux, n’ont été confirmés que quelques semaines auparavant. Comme le cyclisme ne compte pas sur les droits d’entrée des spectateurs, l’essentiel des revenus provient des commanditaires. Il semble y avoir différentes écoles de pensée au sein des organisateurs de courses. L’une d’elles est de débuter avec un petit budget et de prendre de l’expansion d’année en année, comme ce fut le cas du Tour de Beauce. Une autre philosophie veut qu’on trouve un commanditaire majeur avant d’annoncer ses épreuves, comme le font les organisateurs du Tour de Californie. Et beaucoup d’autres organisateurs annoncent en premier leur course, espérant que l’argent suivra...

Ainsi, après trois mois en Californie, j’ai déménagé mes pénates, avec ma femme et mon fils, vers le Colorado, à Boulder plus précisément. Près de la moitié des coureurs professionnels américains y habitent pour bénéficier des vertus de l’altitude, des parcours montagneux et de la facilité de trouver des partenaires d’entraînement. Toujours est-il que j’ai trouvé la première semaine d’acclimatation difficile, tout comme mon fils d’ailleurs, dont le sommeil s’en est clairement ressenti. Celui des parents aussi, par ricochet.

De plus, mon équipe n’a pas été retenue pour le Tour de Géorgie, entre autres choses parce que cette course compte sur un nombre croissant d’équipes européennes, mais aussi en raison de notre statut de nouvelle équipe Kelly Benefits/Medifast. Nous participerons plutôt au Tour de Virginie.

Après quelques jours à digérer cette déception, j’ai réussi à faire le plein de motivation pour cette deuxième épreuve qui compte quelques belles ascensions au Blue Ridge Parkway. C’est un coin que je connais bien, comme beaucoup de Québécois, grâce aux camps d’entraînement printaniers qui y sont organisés. En mai, je participerai soit à la Milk Ras en Irlande, soit aux Championnats panaméricains au Venezuela et, en juin, je ferai le traditionnel combo Philadelphie-Beauce. D’ici là, bonne route à tous.


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