Anne-Marie Martin

Vous est-il déjà arrivé de rouler à vélo sur une belle route de campagne et qu’une voiture arrivant derrière vous attende patiemment que la voie inverse se libère pour vous contourner en vous laissant la même place qu’à une voiture, et ce, même si vous rouliez en bordure de la route ? Ou encore de rouler en bordure de la route en sentant le respect des autres véhicules ? Rêve ou réalité ?

Dans de nombreux pays d’Europe, dans quelques endroits de la Nouvelle-Angleterre et dans l’Île-du-Prince-Édouard, c’est chose courante. Ici, au Québec, sauf pour de très rares exceptions, ce n’est qu’un rêve. Malgré les nombreuses publicités du ministère des Transports du Québec qui incitent tous les usagers de la route à " partager la route avec courtoisie ", force est d’admettre que la grande majorité des usagers motorisés ne l’a pas encore compris, encore moins intégré. Pour eux, les vélos ça ne va que sur les pistes cyclables ou sur les trottoirs. Quel cycliste de route ne s’est jamais fait pointer le trottoir (avec ou sans injure), ou tout simplement " tasser " sur l’accotement de gravier (ils ne sont pas souvent pavés) par un conducteur inconscient des conséquences d’un tel geste? Un contact auto/vélo ça tue, ça handicape pour la vie ou ça blesse sérieusement le cycliste. C’est rarement sans conséquence. De plus, un véhicule motorisé n’a pas que ses dimensions physiques à considérer, il y a aussi la turbulence qu’il crée autour de lui.

Tout ça, c’est une question de respect. Les cyclistes sur route qui pratiquent leur activité sur une base régulière sont là, de plus en plus nombreux, à parcourir des distances parfois considérables, à se déplacer d’un point à l’autre pour le transport, à voyager durant leurs vacances et à s’entraîner à bonne vitesse pour le plaisir ou la performance. Ils ont donc leur place sur les routes avec les véhicules motorisés... et doivent eux aussi respecter le code de la route. La plupart sont courtois. Ils ne sont pas bruyants et ne polluent pas. De plus, ils sont soucieux de leur condition physique et de leur santé.

À l’opposé, un vélo qui roule à vive allure n’a pas sa place sur une piste cyclable très achalandée par des cyclistes récréatifs et des adeptes du patin à roues alignées. À la rigueur, ça peut aller la semaine, mais avec prudence.

En Europe, les cyclistes sur route sont une fierté, une tradition; ils sont respectés. Évidemment, les histoires prestigieuses de grands événements comme le Tour de France, le Giro d’Italie, le Tour d’Espagne et le Paris-Roubaix, ne sont pas étrangères à cette situation. De ce côté-ci de l’océan, il existe maintenant plusieurs événements récréatifs comme le Tour de l’Île, le Grand Tour et quelques Cyclo-sportives. Du coté compétitif, le Grand Prix de Beauce et le Tour de l’Abitibi possèdent leurs lettres de noblesse.

On commence également à prendre conscience de nos bons cyclistes tels que Lyne Bessette, Geneviève Jeanson, Charles Dionne, Dominique Perras (et bien d’autres, excellents mais moins médiatisés). Il semble, par contre, que cela ne suffise pas. En effet, les cyclistes sont trop souvent en péril sur les routes du Québec ou en milieu urbain. Malgré une soi-disant situation qui s’améliore au fil des ans ou malgré le fait que cette situation soit meilleure ici que dans bien des endroits au Canada, le risque est toujours élevé. Cette saison encore, il y a eu trop de morts !

Automobilistes et camionneurs, soyez courtois et intelligents. Quand vous croiserez des cyclistes à votre droite sur la route, les quelques secondes que vous prendrez pour assurer leur sécurité ne vous retarderont pas. Vous pouvez difficilement imaginer à quel point ce geste sera apprécié.

Et si vous croisez des cyclistes à la tête folle, il ne faut pas céder à l’impatience! Les pousser sur l’accotement pour leur faire peur, au risque de les tuer en les frappant, ce n’est pas une solution. Une chute à vélo, ça fait mal et certains ne s’en remettent jamais !

source : Magazine Boutique Courir 2003-2004, p.16

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