Montréal, 13 février 2003 – « Le fabuleux destin de Manon Jutras ». Voilà comment l’athlète de 35 ans présente à ses proches son aventure dans le monde du cyclisme depuis maintenant plus de deux ans. Avec le tour Valley of the Sun qui s’amorcera vendredi, à Phoenix (Arizona), la native de Drummondville donnera le coup d’envoi de sa saison 2003. Pour l’occasion, Jutras s’alignera avec sa nouvelle formation, l’équipe américaine Saturn, qui compte déjà dans ses rangs Lyne Bessette.
Du triathlon au cyclisme
L’entourage du triathlon québécois connaît bien Manon Jutras. Durant les années 1990, elle et son copain Jocelyn Gascon-Giroux, présent aux derniers Jeux du Commonwealth, ont fait leur marque sur le circuit de la Coupe du Québec.
Puis, après quelques courses en cyclisme sur route avec l’équipe du Québec en 2000, elle reçoit un coup de fil d’André Aubut qui lui offre de se joindre à la nouvelle équipe de sa protégée Geneviève Jeanson. Jutras passera ses deux premières années professionnelles chez Rona.
L’automne dernier, c’est au tour de Giana Roberge (directeur sportif chez Saturn) de manifester son intérêt pour la Québécoise. « J’ai d’abord été surprise qu’on m’approche, avance la principale intéressée. Leur proposition était très sérieuse et j’ai pesé le pour et le contre. Après une longue réflexion, j’ai décidé d’embarquer. »
Difficile de quitter une formation où on était capitaine ? « Je mentirais si je disais que la décision a été facile à prendre. Rona a été ma première équipe et j’ai eu la chance d’avoir un directeur sportif qui m’a sélectionnée alors que je n’avais pas d’expérience. J’ai beaucoup appris au sein de cette organisation. Je garde d’excellents souvenirs de cette expérience, mais d’un autre côté, je regarde en avant pour cette saison. »
En joignant la formation américaine, Jutras aura accès à plus de ressources, un meilleur salaire et des obligations différentes. Par contre, et c’est inévitable, la pression sera au rendez-vous pour celle qui a été engagée en raison de ses qualités de super domestique.
« Oui, il y a de la pression, mais j’en avais aussi quand j’étais représentante pharmaceutique. De manière plus spécifique, mon rôle sera différent d’une course à l’autre, mais il ne sera pas aussi clair que lors des dernières années. L’équipe possède plusieurs atouts, ce qui était différent de Rona, où tout le monde devait travailler pour Geneviève (Jeanson). »
Après un camp d’entraînement d’une dizaine de jours qui s’est déroulé le mois dernier en Californie, Lyne Bessette avait déjà de bons commentaires à propos de sa nouvelle coéquipière : « C’est une bonne fille qui sait ce qu’elle veut et où elle s’en va. Elle connaît ses objectifs et avec elle comme avec mes autres coéquipières, tout le monde est sur la même longueur d’onde. »
Au calendrier de la nouvelle saison, notons que Jutras participera à sa première compétition en sol européen (le Tour de l’Aude). La course par étapes ConAgra (anciennement le HP women’s challenge), qui était prévue à son horaire, a été annulée il y a quelques semaines.
« C’est dommage », avance celle qui avait pris part à l’édition 2002. « C’était une des plus longues courses féminines. Elle existait depuis 20 ans. Je ne sais pas si cette disparition aura un impact sur la Coupe du monde de Montréal car les équipes européennes faisaient une série de courses en Amérique du Nord. »
Une carrière sportive sur le tard
Alors que la quasi-totalité des athlètes de haut niveau arrive sur le marché du travail après leur carrière sportive, Manon Jutras a fait le chemin inverse. Diplômée universitaire en microbiologie et en gestion marketing, la cycliste a laissé tomber un emploi bien rémunéré et épuisé ses congés sans solde afin de poursuivre sa passion. Malgré qu’elle ait quitté le domaine pharmaceutique depuis plus de deux ans, Jutras garde contact avec ses anciens collègues de travail.
« Ils (ses anciens collègues) sont fascinés par mon aventure », explique celle qui ne reçoit aucun financement de Sport Canada. « J’ai la chance de les rencontrer souvent. Ils m’ont même fait un petit cocktail en mon honneur à la fin de l’été dernier. C’est certain qu’ils me trouvent bizarre, mais disons que c’est dans le bon sens du terme ! »
Qui plus est, son conjoint a lui aussi fait le même parcours, quittant un poste d’ingénieur en télécommunications pour se consacrer à sa carrière de triathlonien. Le couple réside maintenant à Victoria, en Colombie-Britannique, afin de profiter du climat plus propice à l’entraînement.
« C’est un double défi pour le couple, mais nous sommes heureux dans tout ça. Nous savons que nous pourrons reprendre nos carrières professionnelles plus tard. Je pourrai toujours être une bonne superviseure des ventes quand je retournerai sur le marché du travail. Avec ma nouvelle carrière, je continue à développer mes compétences, sauf que maintenant, mon emploi est celui de cycliste professionnelle. J’ai un rôle de leadership à jouer au sein d’un groupe qui est compétitif et tout ça se transfère dans le monde du travail de façon très évidente. »
Verra-t-on Jutras boucler la boucle de son parcours cycliste l’an prochain aux Jeux d’Athènes ?
« J’aimerais bien que ça puisse se réaliser, mais mon premier objectif demeure de rencontrer les attentes de mon équipe professionnelle. Athènes, oui c’est réaliste, mais je me concentre sur une saison à la fois. Je fais ce que j’aime et c’est ce qui est le plus important. »
Rédaction : Mathieu Laberge
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